Notre réflexion pour le dimanche des Rameaux est écrite par la Sœur Mary Owens I.B.V.M., directrice de Nyumbani, qui comprend le premier et plus grand centre d’accueil du Kenya pour orphelins vivant avec le VIH, un programme de soins à domicile et le village Nyumbani.
Dans la célébration liturgique du dimanche des Rameaux, nous sommes confrontés à une contradiction dans l’expérience de Jésus alors qu’il révèle sa mission. Son entrée triomphante à Jérusalem est suivie de l’histoire de sa passion et de sa mort.
Lors du premier événement, sa mission est acclamée : « Hosanna au Fils de David ! Béni soit celui qui vient au nom du Seigneur ! » (Mt 21, 9). Jésus lui-même est impliqué dans l’organisation de l’événement, demandant de lui amener l’ânesse et son ânon. C’est pour cette raison qu’Il est venu dans notre monde, afin que tous connaissent l’amour inconditionnel de Dieu.
Dans la deuxième partie de la liturgie, nous entendons ces mêmes personnes se tourner contre Lui seulement quelques jours plus tard et crier : « Qu’il soit crucifié ! » (Mt 27, 22-23). Quand Caïphe, le grand prêtre, interroge Jésus, « Je t’adjure par le Dieu vivant, de nous dire si tu es le Christ, le Fils de Dieu », Jésus clame son identité, ce qui le portera à sa passion et à sa mort, l’accomplissement de sa mission. Cette acceptation et ce rejet de Sa mission marquent l’appel de Jésus à l’apostolat tout au long de l’Évangile. La profession de foi de Pierre durant les premiers jours de sa vie de disciple, « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant » (Mt 16, 16), est suivie de ses trois reniements durant la passion de Jésus : « Je ne connais pas cet homme » (Mt 26, 69-75).
L’engagement de Jésus envers Son appel, par contre, est total, aussi bien quand Il est acclamé comme le sauveur que quand Sa mission est contrastée par le mal du pouvoir, de la cupidité, de la corruption. En tant que disciples de Jésus, Le suivre nous portera à des moments où Il nous utilisera comme des instruments efficaces de l’Évangile. Les personnes nous répondront avec enthousiasme, nous louerons, nous accueillerons avec chaleur. Toutefois, quand nous mettrons en discussion le statu quo du contrôle, de l’image, de la stigmatisation de la différence, par exemple des personnes vivant avec le VIH, quand nous parlerons de l’injustice de la distribution inégale des ressources mondiales, de l’appât du matérialisme qui creuse le fossé entre les riches et les pauvres, de l’exercice du pouvoir qui a recours à la violence plutôt qu’au dialogue pour résoudre les conflits, alors nous pourrons nous attendre à la passion. Quand nous restons fidèles à notre foi en Jésus, nous pouvons même être confrontés à la mort, comme cela arrive aujourd’hui dans certaines parties de notre monde.
Quel est l’appel de l’Évangile d’aujourd’hui ? Je crois que nous sommes appelés à proclamer que chacun d’entre nous est une belle création de Dieu, faite à l’image de Dieu et aimée inconditionnellement de Dieu. Nous ne sommes pas tout-puissants, nous sommes contaminés par le fait de vivre dans un monde souillé par le péché, nous cédons à la tentation et nous avons sans cesse besoin d’être pardonnés. Toutefois, fondamentalement, nous sommes devant Dieu rachetés par la passion et la mort de Jésus et destinés à être avec Dieu dans la vie après la Résurrection.
Comment pouvons-nous mettre cette foi en pratique dans notre vie quotidienne ? Je crois que nous sommes appelés avant tout à faire preuve de compassion envers les autres, indépendamment de leur identité et de leur statut, par exemple dans nos relations avec les enfants/adultes vivant avec le VIH. Je crois que nous sommes appelés à être une présence de réconciliation et de pardon plutôt que de jugement… « Cela aurait tout aussi bien pu être moi ! ». Fidèles aux valeurs évangéliques, nous sommes appelés à valoriser la différence plutôt que le préjugé.
« Qui suis-je pour juger ? » – Pape François, juillet 2013.
Nous sommes appelés à témoigner que Dieu, et non le pouvoir ou le matérialisme, peut répondre à nos aspirations, à travers la rectitude de nos valeurs personnelles et la simplicité de notre vie. « Tu nous as faits pour toi, Seigneur, et notre cœur est inquiet jusqu’à ce qu’il repose en toi » – Saint Augustin. Nous sommes appelés à contrer le mal plutôt qu’à le condamner en défendant courageusement les droits de l’homme et la justice conformément à notre foi chrétienne, ce qui peut porter à la persécution. « Un serviteur n’est pas plus grand que son maître. Si l’on m’a persécuté, on vous persécutera, vous aussi. » (Jn 15, 20).
Alors que nous accompagnons Jésus durant la Semaine sainte – en esprit, durant les célébrations liturgiques et dans nos prières – puisse notre engagement personnel à suivre Jésus dans le monde d’aujourd’hui être toujours plus profond et puissions-nous recevoir la grâce de refléter Jésus dans notre vie. Alors que nous cherchons à proclamer l’Évangile de Jésus, puissions-nous entendre l’inspiration du Saint-Esprit qui nous guide tandis que nous nous efforçons d’accompagner les autres dans leur recherche de réponses à leur vocation ultime et plus profonde : l’union avec Dieu