« Chaque fois qu’il y a souffrance dans le corps, partout où des membres de ce corps sont dans le besoin ou opprimés, nous devons nous sentir concernés parce que nous avons reçu le même corps et nous en faisons partie. Nous n’avons pas le droit de mépriser un frère ou de lui dire ; « je n’ai pas besoin de toi, je ne veux pas t’aider »
Nous profitons ce Jeudi saint pour féliciter tous les prêtres en ce jour spécial où Jésus-Christ constitue l’Eucharistie par qui ils s’identifient à lui. C’est un privilège unique accordé à un simple être humain d’offrir au Père son Fils pour le salut du monde.
Nous choisissons deux textes bibliques pour notre réflexion. D’abord celui d’Isaïe 61, 1-2 que Jésus a cité dans l’évangile selon Saint Luc 4,16-21 durant la messe chrismale ; puis celui du discours eucharistique de Jésus en Jean 6, 53-54.
Isaïe 6, 1-2 « L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé : porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération, et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés, annoncer une année favorable accordée par le Seigneur ». Jésus se reconnaît dans cette annonce du prophète Isaïe qui est écrite VIII siècles plus tôt. C’est l’annonce de l’arrivée d’un sauveur dans le contexte d’un peuple en désolation.
Ce contexte constitue « la composition de lieu » dans le langage des exercices spirituels de Saint Ignace de Loyola. On entend par cette expression le regard objectif de la réalité par l’imagination avant de la porter dans la méditation et dans la prière. Cette réalité dans notre contexte actuel est « un monde beau mais souffrant » selon notre prière pour l’année ignatienne . Un monde qui a besoin des oints du Seigneur comme le Christ pour réconforter les malheureux et les exclus évoqués par la deuxième des préférences apostoliques universelles de la Compagnie de Jésus ; de véritables évangélisateurs, porteurs d’espérance qui « retrouvent et augmentent la ferveur, la douce et réconfortante joie d’évangéliser, même lorsque c’est dans les larmes qu’il faut semer…Que le monde de notre temps qui cherche, tantôt dans l’angoisse, tantôt dans l’espérance, puisse recevoir la Bonne nouvelle, non d’évangélisateurs tristes et découragés, impatients ou anxieux, mais de ministres de l’Evangile dont la vie rayonne de ferveur, qui ont les premiers reçu en eux la joie du Christ .»
En voyant une partie inquiétante de notre réalité telle que le SIDA, le COVID19, le paludisme, le terrorisme, la guerre en Ukraine… en qui beaucoup de nos frères et sœurs souffrent et meurent, nous n’avons pas le droit de nous décourager mais de montrer compassion et de témoigner toujours de l’espérance, bref de porter la Bonne Nouvelle.
Cette Bonne nouvelle va toujours de pair avec l’Eucharistie qui marque l’ultime salut en évoquant la mort et la résurrection du Christ. Ce n’est plus le mal, la mort qui aura le dernier mot mais la vie, la résurrection. Dans son discours eucharistique Jésus a proclamé : « Amen, amen, je vous le dis : si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’homme, et si vous ne buvez pas son sang, vous n’avez pas la vie en vous. Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle ; et moi, je le ressusciterai au dernier jour » Jean 6, 53-54.
Un des principaux messages dans l’institution de l’Eucharistie est : la «Koinonia», la communion. L’Eucharistie nous unit avec Dieu, avec Jésus et avec tous les êtres humains. Une communion que notre futur bienheureux Pedro Arrupe nous a montré comment la vivre: « Chaque fois qu’il y a souffrance dans le corps, partout où des membres de ce corps sont dans le besoin ou opprimés, nous devons nous sentir concernés parce que nous avons reçu le même corps et nous en faisons partie. Nous n’avons pas le droit de mépriser un frère ou de lui dire ; « je n’ai pas besoin de toi, je ne veux pas t’aider »
Cette communion s’étend jusqu’à toute la création dans la perspective de « Laudato si : « L’Eucharistie unit le ciel et la terre, elle embrasse et pénètre toute la création. Le monde qui est issu des mains de Dieu, retourne à lui dans une joyeuse et pleine adoration : dans le Pain eucharistique, «la création est tendue vers la divinisation, vers les saintes noces, vers l’unification avec le Créateur lui-même ».
Notre monde a plus que jamais besoin de solidarité, de compassion, de don de soi, du courage, d’espérance etc. autrement dit d’évangélisation dont la ressource est puisée de l’Eucharistie.
Que la célébration de ce jeudi saint 2022 revive notre identité d’oint du Seigneur pour apporter la Bonne nouvelle dans notre monde actuel.
Père Noël Cyprien Médard RAZAFINANDRAINA
Directeur, Centre Arrupe, Madagascar